La décroissance pour transmettre des valeurs aux enfants

La vie comme un art

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En 2012, j'ai fait un choix radical. J'ai fuit. J'ai fuit le Maroc et j'ai fuit l'argent, j'ai fuit une stabilité économique et un mode de vie que beaucoup m'enviait, pour mettre en pratique mes théories et rechercher par moi même ce qui me permettrait de transmettre des valeurs saines à mes enfants. Je suis passé du statut de Compagne d'un directeur de radio privée à auto-entrepreneure mère célibataire au RSA.

Quand j'étais mère au foyer et vivait avec le père de mes enfants, je ne manquais de rien. Matériellement. J'étais très choyée. Le père de mes enfants avait un très bon salaire, nous vivions dans le triangle Casablancais, nous étions de toutes les sorties mondaines du milieu de la com' et des arts. Mes amies étaient intelligentes et leurs enfants étaient pour la plupart dans des écoles plus chères que le prix d'une bonne voiture d'occasion par an. (La nana qui compte en voiture d'occasion, déjà ça dit déjà beaucoup de choses...)

Si matériellement je ne manquais de rien, d'un point de vue moral, ça commençait à franchement puer la merde pour moi... Mes amies s'avéraient être des femmes vénales, préoccupées par le profit et par leur image sociale, par les faux semblants et les apparences... Leurs enfants étaient sincèrement mal élevés, souvent par des bonnes exploitées et analphabètes et la violence commençait à montrer les conséquences des gifles et autres maltraitances "éducatives" chez eux au fur et à mesure qu'ils grandissaient... Les déviances et autres excuses d'aveuglement s'immisçaient partout et souvent face à ma tristesse et mon désarroi sur des situations que je jugeais moralement plus que répréhensibles, je me retrouvais choquée avec pour seule réponse "C'est comme ça"...

Les bébés qui dorment toute la journée (drogués ou alcoolisés) par terre dans les bras de femmes qui ne sont pas leur mère et qui les louent pour faire la manche ? C'est comme ça. Les enfants des rues qui sniffent de la colle et grandissent sous nos yeux qui voient la prostitution cueillir des petites filles qui nous souriaient 4 ans avant ? C'est comme ça. Les maris qui trompent leur femme aux yeux de tous ? C'est comme ça. Les femmes méchantes qui font la loi et dictent le droit de parole, de vie et de mort des autres ? C'est comme ça...

C'était trop pour moi. Je n'en veux plus au Maroc de m'avoir fait traverser l'enfer comme un paradis. J'aime trop ce pays pour lui en vouloir de quoi que ce soit. L'enfer est partout dans le monde pour qui ne sait pas aménager sa zone de paradis. J'ai mis du temps à comprendre que le problème ne venait pas du Maroc, mais du "C'est comme ça" que l'on trouve partout dans le monde dès lors que l'on s'interroge sur une injustice bien ancrée dans les moeurs. Alors comme c'était trop pour moi, j'ai fuit.

Face à la croissance, j'ai plongé dans la décroissance. J'ai fait ce que je pensais juste pour mes enfants. J'ai écouté mon instinct de mère et j'ai puisé en moi toutes les ressources nécessaires pour m'atteler au maximum à transmettre des valeurs saines et positives à mes enfants loin des status quo pervers et immuables.

"Selon les acteurs du mouvement de la décroissance, le processus d'industrialisation a trois conséquences négatives : des dysfonctionnements de l'économie (chômage de masse, précarité, etc.), l'aliénation au travail (stress, harcèlement moral, multiplication des accidents, etc.) et la pollution." Wikipédia

Je suis donc rentré en France dans un premier temps pour arrêter de vivre un choc culturel trop intense pour que je puisse réaliser tout ce que je voulais réaliser et arrêter de subir la violence qui était partout dans ma vie ! Mon compagnon me trompait, mon patron me harcelait sexuellement, la pauvreté était partout autour de moi ! Trop ! Ma suradaptation marocaine me demandait trop d'énergie pour que je puisse me concentrer à donner mon énergie à recréer des valeurs -ma foi quelque peu perdues à l'époque... Il me fallait du calme et il me fallait surtout des racines pour donner des ailes à mes enfants. J'ai commencé, à tâton, par retourner à l'origine de mes racines : Bordeaux.

J'ai trouvé un studio de 27m2. Puis j'ai partagé mon temps entre Casablanca et Bordeaux pendant quelques mois. Cette transition permettait à mes enfants de s'acclimater à Bordeaux, à l'absence de leur père et à notre tout petit logement qui remplaçait notre belle appartement Casablancais.

J'ai proposé à mes deux petites filles de un an et 3 ans de vivre la vie comme un jeu et je l'ai joué pour elles. Tout a été aménagé pour mes enfants. Toujours. Elles sont toujours resté jusqu'à aujourd'hui la plus grande priorité qui dirige ma vie. Je peux renoncer à tout ou tout accepter pour leur bien être. Parce que de fait, ça me rendra bien. En priorisant mes enfants, non seulement je me priorise, mais en prime, je priorise la vie. Tout un programme majestueux !

Pour créer un environnement propice à l'éducation de mes enfants et à leur ouverture aux autres et au monde, j'ai ouvert une boutique avec l'idée d'en faire une boutique de matériel pour enfant et maman, un thème qui me permettait de me perfectionner dans ma maternité et de faire rencontrer des enfants à mes filles... Ma boutique était entièrement aménagé et designer à l'intérieur pour que mes enfants puissent y passer toute la journée dans la joie, avec moi. Et c'est ce que nous avons fait. Nous sommes resté fidèles à nos valeurs de générosité, de don de soi et d'ouverture aux autres dans une boutique colorée et chaleureuse dans laquelle des dizaines de gens venaient nous raconter leurs histoires extraordinaires et partager un moment de vie simple avec nous.

Au final, j'ai appris à coudre dans ma boutique et j'ai même lancé ma marque de vêtements et accessoires par goût pour ma nouvelle passion que j'ai découvert pour nourrir mes enfants après ma séparation définitive avec leur père qui ne nous a jamais aidé financièrement. Il a fallut que j'apprenne vite et soit rentable immédiatement pour pouvoir nourrir mes enfants et payer toutes mes charges. Lors de ma première année de couture, j'ai été sélectionné par Télérama comme la meilleure boutique de vêtement femme de Bordeaux et bon gré, mal grè, j'ai réussi à dépasser les épreuves qui s'imposaient à moi. Ce qui était pour mes enfants et moi de grands moments de fierté et de bonheur, de dépassement de soi et de vie, simplement.

C'est dans cette période de disette que j'ai pu injecter le maximum de valeurs à mes filles sur le respect des choses matérielles et de la vie. On ne gaspille pas, on ne jette pas si on peut garder et on donne dès qu'on le peut, on réfléchit bien avant d'acheter et on choisit consciencieusement. On écoute ce que le corps veut manger et on ne lui donne pas plus qu'il ne peut accepter. On évite la maladie et on se soigne correctement en prenant soin de son hygiène et de son corps d'une façon active et réfléchie. On doit chercher des réponses innovantes pour trouver des solutions quand on n'a pas d'argent pour résoudre le problème et à travers la quête de ces solutions innovantes, il n'est pas rare de se trouver soi même et d'en ressortir très riche intérieurement et pas plus pauvre économiquement.

Nous avons traverser tout cela ensemble et nous avons toutes les trois beaucoup appris. Je repense en riant que j'ai même lavé mes vêtements avec du jus de feuilles de lierre pour essayer ! Moi j'ai trouvé que ça fonctionne ! Mais ça ne sentait pas "Secret d'ailleurs Bora-bora"... Essayez, vous me direz.

Que ça soit pour la nourriture, les vêtements, le matériel, je me suis pleinement investi très sincèrement à un retour vers une vie simple et harmonieuse . Une vie dans laquelle l'argent ne règne pas, mais où il est pris en compte. Sans rejeter la société, j'ai fait un pas de côté pour mieux l'apprendre à mes enfants et ça m'a appris à moi même.

Chaque jour a été un défi et une leçon. Parfois c'était même chaque heure qui devenait un combat... Mais cette façon de vivre que j'ai tant recherché et mise en place m'a rendu tout ce que j'avais perdu au Maroc : ma foi en Dieu déjà qui s'était affaiblie face à la laideur de l'humain, ma foi en l'humain que j'avais parfois même du mal à voir encore en moi et surtout, bonheur suprême, ma joie de vivre.

En choisissant de donner des valeurs fortes à mes enfants en traversant la précarité pour ne pas me trahir dans une relation sentimentale économico-dépendante ou dans une relation professionnelle aliénante, je me suis offert une force incroyable que j'ai exclusivement crée en toute conscience pour me conserver autant que possible ma joie de vivre sans laquelle je meurs, tout simplement.

C'est cette valeur que je me suis acharnée à transmettre à mes enfants, la joie de vivre, propre et debout, même quand les autres vous pensent sale et socialement morte.

Et c'est pour cette valeur encore de joie de vivre que je pense qu'il est temps pour moi d'arrêter mon mouvement de décroissance. Parce que je ne crois pas plus en la décroissance qu'en la croissance. Je crois en l'adaptation. S'il est important plus que tout pour moi que mes filles soient des "bonnes personnes". Il est important pour moi qu'elles vivent la vie avec intensité et accèdent à ce dont elles désirent accéder, tout comme moi.

Et je veux des Louboutin.

 


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